L’écrivain et philosophe camerounais Achille Mbembe, spécialiste de l’Afrique, a livré son analyse sur la situation au Niger, où un coup d’État militaire a renversé le président élu Mohamed Bazoum. Dans une tribune publiée par le journal Le Monde, il appelle la France à revoir sa politique vis-à-vis de son ancienne colonie et à adopter « la juste distance« .
Qu’est-ce que la juste distance ?
Selon Achille Mbembe, la juste distance est « une distance qui respecte la souveraineté du peuple nigérien, qui ne s’immisce pas dans ses affaires intérieures, qui ne cherche pas à imposer ses intérêts ou ses vues, mais qui l’accompagne dans sa quête de démocratie et de développement ». Il estime que la France a trop souvent joué un rôle ambigu au Niger, en soutenant des régimes autoritaires ou en intervenant militairement pour contrer les menaces terroristes, sans se soucier des aspirations populaires.
Quels sont les enjeux du Niger pour la France ?
Le Niger est un pays stratégique pour la France, qui y puise une partie de son uranium, nécessaire à son industrie nucléaire. Le Niger est aussi un allié essentiel dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, où la France déploie plus de 5 000 soldats dans le cadre de l’opération Barkhane. Mais cette présence militaire est de plus en plus contestée par une partie de la population nigérienne, qui la perçoit comme une ingérence néocoloniale.
Comment favoriser une transition démocratique au Niger ?
Achille Mbembe appelle à respecter le verdict des urnes, qui a donné la victoire à Mohamed Bazoum, le candidat du parti au pouvoir, face à Mahamane Ousmane, l’ancien président soutenu par les putschistes. Il invite aussi à dialoguer avec toutes les forces vives du pays, y compris les mouvements sociaux et les jeunes, qui réclament plus de justice sociale et de participation politique. Il plaide enfin pour une coopération renforcée entre le Niger et ses voisins, notamment le Nigeria, le Burkina Faso et le Mali, afin de faire face aux défis communs de la sécurité et du développement.